Lynx pardelle, entre ombre et lumière

Pourquoi une exposition photo sur le lynx, et plus particulièrement sur le lynx pardelle ? Les différentes espèces de lynx souffrent partout de la réduction de leur habitat naturel. Dans le Jura notamment, le lynx boréal reste la proie de braconnages mettant en péril les programmes de réintroduction. Le lynx ibérique ou pardelle est l’une des rares espèces à voir sa situation s’améliorer. Son histoire a pourtant connu de nombreuses zones d’ombre. Au début du 20ème siècle, en Espagne et au Portugal, on comptait plus de 100 000 lynx pardelle mais à cause du développement de l’urbanisation, du braconnage, de l’agriculture intensive, des collisions avec les voitures et de la raréfaction des lapins (sa proie de prédilection) décimés par diverses maladies, sa population a diminué drastiquement. En 2000, il en restait moins de 100 individus, vivant dans une aire de répartition assez restreinte (parc de Doñana, estuaire du Guadalquivir, Sierra d’Andujar en Andalousie). En 2002, il était d’ailleurs classé sur la liste rouge de l’IUCN comme espèce en danger critique d’extinction, suite au recensement national. WWF Espagne a donc décidé de participer au projet européen Life Lince (renommé Iberlince) visant à restaurer une population viable, grâce à des lynx élevés en captivité et réintroduits dans leur milieu naturel. Certaines routes très passantes ont été sécurisées avec des tunnels, afin de diminuer le chiffre des accidents mortels avec les voitures. Plus de 150 000 lapins ont été relâchés. Par ailleurs, plusieurs campagnes de sensibilisation ont été menées auprès des habitants et des chasseurs. A partir de 2016, le lynx est de nouveau présent au Portugal et l’UICN le fait passer de la catégorie « en danger critique » (CR) à la catégorie « en danger » (EN). En 2020, la Commission européenne approuve le projet « Connecter les populations de lynx ibériques pour assurer leur viabilité démographique et génétique à long terme », avec 21 partenaires, dont le WWF-Espagne. Ce projet doit durer jusqu’en 2024. A l’heure actuelle, on compte plus de 1 365 individus sur la péninsule ibérique. Le programme de réintroduction porte donc ses fruits et donne des résultats encourageants. Toutefois, pour assurer une population viable et augmenter le nombre de femelles reproductrices, il faudrait multiplier par trois la population actuelle. Les images de cette exposition proviennent de plusieurs séjours en Espagne, dans différents affûts, dans des zones où la présence de points d’eau, ainsi que la forte densité de lapins et de perdrix, augmentent les chances d’observation. Il n’y a eu aucun appât utilisé. Pour espérer rencontrer et photographier le lynx, le meilleur moyen est d’être en place dans un affût, avant le lever du jour, et d’y rester jusqu’à la tombée de la nuit. Sur place, il faut rester silencieux et éviter les mouvements brusques. Un autre moyen est la billebaude mais c’est beaucoup plus aléatoire avec un animal aussi discret et craintif. Par le biais de cette exposition, je souhaite montrer au public un animal fascinant et souligner l’exemple d’un programme de réintroduction réussi et qui donne une note d’espoir aux différentes associations qui œuvrent pour la conservation et la protection des espèces.